Actuellement se tient, pour un mois et online, la conférence annuelle de MARQUES, association européenne visant à la protection des intérêts des détenteurs de marques depuis plus de 30 ans. La première table ronde de la conférence portait sur le rôle de la technologie blockchain pour la protection de marques : j’ai été convié par Bardehle Pagenberg à apporter une contribution à ce sujet aussi vaste que complexe. Cette contribution n’a pas la prétention d’être exhaustive, juste d’illustrer que la conversation mondiale permanente générée par les réseaux sociaux étend ce que « protection des marques » doit signifier. Dans une acceptation usuelle, c’est un sujet essentiellement juridique qui a trait à la protection des symboles de la marque : logos, copyrights, brevets, etc. Les enjeux peuvent être aussi considérables que les coûts de procédure, pour les deux parties d’ailleurs, comme l’illustre le conflit actuel entre Nokia et Mercedes. Mais les délais sont à l’avenant : considérables. Or aujourd’hui les marques sont confrontées, et donc doivent se protéger, contre un risque non moins destructeur mais dont la survenance et l’impact sont infiniment plus rapides : le risque de réputation. Ce risque peut provenir de l’action ou de l’inaction propre d’une marque, bien sûr : Greenpeace, dans l’une de ses campagnes pour la suppression des polluants toxiques dans l’industrie textile, utilisait le symbole même d’une marque pour l’interpeller : « Just Do it ». Aujourd’hui, l’organisation n’hésite pas à classer la marque à la virgule parmi les « greenwashers ». Quelle que soit l’opinion sur le fond, l’attaque réputationelle est violente. Il peut aussi être lié à l’évolution de la réputation d’un fournisseur. Lorsque Facebook a été accusé cet été de ne pas se préoccuper, voire de promouvoir les contenus haineux ou discriminatoires, ce sont plus de 1000 marques qui ont annoncé leur boycott de la plateforme publicitaire en quelques jours pour se détacher nettement de la polémique.
Enfin le risque peut venir des tiers au sein de la supply chain de la marque : c’est la catastrophe du Rana Plaza, ou le risque d’implication indirecte dans du travail forcé via un sourcing un peu aveugle de coton, cacao, cobalt, noisette, mica, etc. Cela peut être aussi un rappel produit mal exécuté par un distributeur, mais qui au final entachera surtout la marque concernée… Sous cet angle, la protection de la marque nécessite finalement deux choses. Tout d’abord la démonstration de l’alignement entre les engagements RSE standardisés d’un rapport annuel et les actions concrètes : la transparence. Ensuite la maitrise, et donc la connaissance précise, de l’ensemble de la supply chain : la traçabilité. Les deux s’alimentent continuellement, et constituent les piliers sans lesquels la réputation d’une marque repose aujourd’hui sur des sables de plus en plus mouvants.
[Un article de Matthieu Hug, CEO @Tilkal]
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